Premiers pas dans le Rajasthan

Jaipur... Je me suis lancée dans la rédaction d'un journal de bord de nos excursions week-endesques; le récit de ce séjour est encore inachevé et tient déjà sur dix pages... Je vais m'efforcer de faire plus court, d'être concise, de mettre en marche mon esprit de synthèse... Je ne suis pas sûre d'y parvenir alors excusez mes longueurs...

Premiers pas dans le Rajasthan, premiers pas dans les gares indiennes... Direction New Delhi Railway Station, on arrive largement en avance ce qui nous laisse le temps de rencontrer des Français, dont un lyonnais... décidément... ! Etude sociologique intéressante sur le quai de la gare en fonction de la classe dans laquelle les gens vont prendre place.. Le train arrive à l'heure, on s'installe dans notre compartiment.. Rien de très typique, on est entouré d'occidentaux ! Le trajet passe plutôt vite, après une petite sieste tête bêche, on débarque à Jaipur vers une heure du matin.
Pour 50 Roupies, on rejoint rapidement notre hôtel qui est une vraie merveille... (merci mon photographe!)... Des terrasses partout...
On se réveille de bonne heure pour profiter de notre journée.. Première excellente surprise de la journée, il y a l'eau chaude ! Première douche tiède depuis mon arrivée, c'est un pur bonheur !
C'est parti pour la visite de la ville, location d'un rickshaw à la journée. Découverte du Fort d'Amber à quelques kilomètres de Jaipur, un vrai bijou perché en haut de la montagne. C'est splendide, dommage il ne fait pas très beau donc les photos ne sont pas terribles..
Beaucoup de regards et de sourires encore, ça doit être l'effet shorty.. !

Puis redescente dans la vieille ville de Jaipur, la ville rose.. On se rend enfin compte que l'on est au Rajasthan, l'architecture et les couleurs sont magnifiques. Il y a des petits Français partout, c'est affolant, la plupart des vendeurs et des chauffeurs de rickshaw parlent notre langue, et certains vraiment très bien... Weird... !
On pénètre les rues de Jaipur avec ses immenses marchés..

On tombe sur un photographe du début du siècle qui nous prend en photo avec un vieil appareil à plaques.. c'est géant.. Pendant qu'Antho attend le tirage, je me fais ouvertement draguer par le vendeur d'à côté.. je succombe, je repars avec un pashmina.. mais quand même, pour ma défense, je fais descendre le prix de 1200 à 500 roupies.. ! Nouvel épisode quelques minutes plus tard.. Après le gang des trav', on fait la rencontre d'un Sadhu, caste de religieux mendiants.. Pas très cool le Sadhu, il veut une cigarette mais je n'en ai plus, puis il veut dix roupies mais sa requête n'est pas vraiment déposée de façon très courtoise.. on file rapidos, il nous poursuit dans la rue, en tapant très fort avec son bâton par terre..  On presse le pas, on finit par le semer... !
Retour à l'hôtel en fin daprem.. en vélo rickshaw.. Etrange sensation que de se faire traîner par un petit homme d'une cinquantaine de kilos, analphabète, qui ne trouve pas sa route, et qui est épuisé à force de pédaler...
Arrivés au Arya Niwas, on établit le programme de la soirée... On repère un hôtel dans notre guide, considéré comme "l'un des plus prestigieux hôtels du pays", on s'aventure juste pour prendre un petit verre... Mais là, en arrivant... Prestigieux n'est pas assez fort.. C'est magique, un vrai Palais de Maharadjahs. Des couleurs, des odeurs.. c'est indescriptible.. On ne résiste pas à la tentation de goûter un petit risotto à la truffe accompagné d'une petite coupette.. Heureusement, nous n'avons pas vu trop d'horreur aujourd'hui du coup on profite un peu sans trop culpabiliser.. Petite assiette de fromage avec miel à la truffe.. Ce soir, c'est truffe all inclusive... ! On a beaucoup de mal à partir, c'est tellement grandiose..

Dimanche, réveil sous un soleil de plomb, Antho dort encore.. je sors fumer ma petite cigarette du matin, et je commence à écrire quelques lignes... On quitte l'hôtel vers midi, direction The Monkey Temple, beaucoup de singes en effet, c'est un peu angoissant ! Heureusement, on trouve une famille indienne qui nous prend sous son aile, on fait un petit bout de chemin avec eux.. Bizarre ici, la curiosité tombe dans la vulgarité, j'ai l'impression d'être un morceau de viande... Ignorance, ignorance..
Au bout de quelques minutes de marche... on découvre une cité interdite au fond de la vallée, une cité religieuse hors du temps et de l'espace.. Des hommes se baignent dans l'eau sacrée.
Encore une belle découverte.. !
Fin d'après-midi dans les rues de Jaipur, c'est vraiment une jolie ville qui, malgré le tumulte des rickshaws, dégage une atmosphère paisible.. Je craque pour mes premiers bijoux indiens, après de longues négociations, of course !
Retour à l'hôtel.. il faut bien que je mette tout ça par écrit... ! Notre train n'est qu'à une heure du matin..
Diner dans le meilleur restaurant indien, je goûte mon premier chicken tikka masala, une vraie tuerie... !
Puis rickshaw jusqu'à la gare, et là....

Après deux jours calmes, sans trop de pauvreté, à visiter des palaces, on se croit immunisés. L'arrivée à la gare est une immense claque qui fait très mal, qui nous revient comme un boomerang en pleine figure. On ne s'y fera donc jamais... C'est assez dur comme moment.. Des gens sont allongés partout par terre dans le hall, et les gardes arrivent en les tabassant de coups de bâton pour les faire dégager.. Il y a des "waiting room" par caste, preuve d'identité demandée à l'entrée.. et pour tous ceux qui n'y ont pas accès, pas de solution, c'est par terre ou tu t'en vas... Et dire que quand on parle de castes avec des Indiens, ils osent nous affirmer que tout ça n'existe plus, que tout ça a été aboli, tout ça avec un tel aplomb.. Mais ils se foutent de qui ??? C'est le passage de "caste" à "classe" qui change la donne ??? Je ne veux pas rentrer dans ce système, je ne veux pas aller dans les upper class waiting room, je ne veux pas rester sur le quai non plus. Je rêve juste d'un endroit où les gens se respectent. Je bouillonne. Ce n'est pas de l'énervement, ça devient de la colère. Brad m'a appris que c'était un grave pêché. Je crois que je m'en tape, il y a des moments où l'on ne peut plus se contrôler, où l'on ne veut plus se contenir, ni même essayer de comprendre quelque chose qui, au fond, ne mérite pas d'être compris. J'aimerais bien être plus détachée, prendre les choses moins à coeur; tout serait tellement plus simple, plus lisse... Mais voilà, je m'effondre.. Cela faisait dix jours que je n'avais pas pleuré, il fallait bien que ça revienne.. C'est tellement d'incompréhension et d'injustice; c'est insupportable de voir tout ça. Ce n'est plus de la tristesse, c'est de la rage, j'ai envie de tout défoncer.. On a l'impression que ce sont de numéros alors un de plus, un de moins, quelle importance...
Heureusement que la fatigue est là, ma tête tourne à cent à l'heure.. J'espère à ce moment précis que le sommeil va arriver, je suis épuisée de penser à tout ça...

Je ne vais pas tarder à poster un article sur les relations humaines en Inde.. Mais cela mérite un temps de réflexion, ça ne s'écrit pas spontanément. Il faut des mots justes, précis, les plus objectifs possibles. Difficile de ne pas juger quand on voit de telles horreurs...