Défaite cuisante

Il fait 37 degrés quand je sors de chez moi ce matin. La douche froide ne fait plus d’effet. Ma nuit a été agitée, je sais ce qui m’attend. Je n’arrive pas à me lever, je repousse au maximum mon réveil, je suis fatiguée, je ne veux pas y aller. Je sais qu’aujourd’hui, je n’ai pas les ressources suffisantes pour repartir au front, je sais que je ne vais pas me battre, je sais que je repartirai vaincue. Par réflexe, je passe chez les Sikh chercher un petit dej, je sais que je n’y toucherai pas, pas envie de m’alimenter ce matin. Je mets dix minutes à franchir la porte de mon premier hôpital, je reste là sur le parvis à observer le va et vient des ambulances, les premiers déchargements de la journée… Puis, il faut bien se jeter à l’eau, même résignée… Comme prévu, c’est une grosse défaite ce matin, et les défaites, ce n’est jamais très bon pour le moral…

En sortant, grosse galère pour trouver un rickshaw qui veuille bien me conduire vers mon second abattoir… Je me retrouve rapidement encerclée par des gardes qui veulent soi-disant m’aider. Les gardes, ce sont rarement les plus fins. Ils sont tous là autour de moi les bras croisés, un sourire pervers plaqués sur leurs visages. Ils rigolent comme des gros porcs. Je ne suis qu’une pute ou un porte-monnaie ambulant pour eux… Il n’y a personne dans la rue. Je sais qu’ils ne peuvent rien faire pour moi, ils ne connaissent pas l’endroit, ils ne parlent pas un mot d’anglais. Je saute dans le premier rickshaw, je veux juste partir d’ici, même si je dois payer le prix fort.. pas trop le temps de négocier, il faut que je file…